Hécatombe à Kumba : huit enfants tués dans l'attaque d'une école

Au moins huit enfants ont été tués et une douzaine d'autres blessés samedi 24 octobre dans l'attaque de leur salle de classe dans une école du Cameroun anglophone, un crime "horrible" vivement condamné par la classe politique camerounaise et l'Union africaine.
Des hommes armés - "un groupe de neuf assaillants terroristes" selon une source proche de la police - ont fait irruption dans le collège Mother Francisca International Bilingual Academy, à Kumba dans la région du Sud-Ouest du Cameroun. Habillés en civil, ils sont arrivés à moto selon un parent d'élève qui se trouvait près de l'école (Reuters). Ils ont ouvert le feu sur les élèves âgés de 9 à 12 ans présents dans la salle de classe : "J'entendais des gens crier et pleurer" a dit un témoin qui se trouvait dans la salle de classe voisine. Certains enfants se sont blessés en sautant par les fenêtres du deuxième étage (toujours selon Reuters).

"Au moins huit enfants ont été tués par des coups de feu et des attaques à la machette. Douze autres ont été blessés et emmenés dans des hôpitaux locaux", a indiqué le bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations unies (OCHA) au Cameroun dans un communiqué.


Maurice Kamto, leader de l'opposition, a parlé d'"horreur absolue". "Combien de morts faut-il encore pour qu'une solution politique ramène la paix dans le NOSO (Nord-Ouest et Sud-Ouest, les deux régions anglophones)?", a-t-il réagi, tandis que le Premier ministre camerounais organisait une réunion d'urgence après l'attaque.

Depuis près de trois ans, des groupes séparatistes et l'armée s'affrontent dans les deux régions camerounaises du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, où vit l'essentiel de la minorité anglophone, dont une partie s'estime marginalisée par la majorité francophone du pays.

"Il n'y a pas de mots pour le chagrin ni de condamnation assez forte pour exprimer toute mon horreur face à l'attaque brutale qui a visé des écoliers en école primaire (...) alors qu'ils étaient assis, en train d'apprendre, dans leur salle de classe", a tweeté Moussa Faki Mahamat, président de l'Union africaine.


"Je condamne sans réserve, les actes de barbarie commis ce jour à Kumba. Assassiner des enfants qui vont apprendre c'est s'attaquer aux fondements même de notre Nation" a pour sa part réagi le ministre de la santé publique du Cameroun, Malachie Manaouda.

"Le boycott des écoles était une stratégie des séparatistes ces dernières années. 700.000 jeunes environ étaient en dehors du système scolaire à cause du conflit", a expliqué à l'Agence France Presse Arrey Elvis Ntui, analyste senior du groupe International Crisis au Cameroun. "Le gouvernement et la société civile anglophone ont mis beaucoup de pression sur les groupes séparatistes pour que leurs enfants retournent à l'école, et des écoles qui étaient fermées depuis des années ont commencé à rouvrir", a-t-il poursuivi.

Les écoles avaient déjà été une cible dans le passé récent, mais n'avaient jamais connu un massacre d'une telle ampleur. Mi-mai, un enseignant de l'université de Bamenda (Nord-Ouest) avait notamment été abattu par des séparatistes car il refusait d'arrêter de faire cours, selon l'ONG Human Rights Watch (HRW). 

L'attaque de Kumba n'a pas encore été revendiquée et les assaillants n'ont pas encore été identifiés officiellement par les autorités. 

"Ces gens (les agresseurs) seront rattrapés par tous les moyens. Je dis bien par tous les moyens", a néanmoins prévenu Chamberlin Ntou'ou Ndong, préfet du département de la Mémé, touché par l'attaque.

Il a également insisté sur le fait que l'école était "non déclarée" et qu'il allait donner des instructions pour que "toutes les écoles du département de la Mémé soient déclarées" pour des raisons de sécurité. 

Les combats au Cameroun anglophone, mais aussi les exactions et meurtres de civils par les deux camps, selon de nombreuses ONG, ont fait plus de 3.000 morts et forcé plus de 700.000 personnes à fuir leur domicile.


"Les forces de sécurité et les séparatistes armés ont à plusieurs reprises, chacun de leur côté, attaqué des hôpitaux et du personnel médical" au cours des derniers mois, avait affirmé l'ONG HRW en juillet.

Les accusations d'exactions par l'armée se sont aussi multipliées ces dernières années. 

En juin, trois militaires camerounais avaient notamment été inculpés de l'"assassinat" en février de civils, dont 10 enfants, dans la partie anglophone du Cameroun.